Contes et Légendes du vieux moulin "DARRE LA GLEIZO"

Contes et Légendes du Vieux Moulin « DARRE LA GLEIZO » :



 Moulin « DARRE LA GLEIZO » La légende du Moulin des âmes !

    Il était une fois, un jeune et vaillant meunier ariégeois blond comme le blé et bon comme le pain qui se prénommait « Urbain ». Il vivait seul dans son moulin « Darre la Gleizo » situé derrière l’église du village et n'entendait guère de ce monde que le souffle du vent dans les ailes de son moulin.

    La journée terminée il prenait son frugal repas et montait dans sa chambre encombrée de sacs de blé et de farine à laquelle il accédait par une simple échelle de bois. C’était une chambrette située au dernier étage sous le toit de son moulin avec une petite fenêtre d’où il pouvait contempler de magnifiques couchers de soleil illuminant son joli petit village huguenot du CARLA-BAYLE et la majestueuse barrière des PYRENEES.

    Un soir alors qu’il venait de se s’endormir, un bruit soudain le tira de son premier sommeil. La meule de son moulin s’était mise en mouvement. Arraché de ses songes, il se mit sur son céans, retenant son haleine et constata qu'en effet la roue du moulin tournait comme en plein jour.

    Étrange… se dit-il ! Peut-être avait-il oublié la veille au soir de bloquer la meule de son moulin !

    Mais un battement sourd et régulier frappait à son oreille. Quelqu'un était entré et montait dans son moulin, puis tout bruit cessa....  Le meunier restait tremblant de peur dans ses draps en cachant sa tête sous son oreiller. Les mêmes bruits résonnèrent de nouveau, puis s’arrêtèrent. Alors le jeune meunier rassembla un peu de courage; se lever, fouiller dans tous les coins, scruter tous les refuges fut l'affaire d'un instant ; mais toutes les recherches restèrent vaines... Rien de rien ! Pas une trace de pas sur la mince couche de farine répandue sur le sol.

    La nuit suivante, avant de se coucher, le meunier décida de barricader la porte d’entrée, attacha solidement le tour de la meule et s'assura qu'il n'y avait personne dans son moulin.

    Mais alors que les cloches de l’église du village sonnaient minuit, le tour se mit en mouvement, comme sous l'impulsion d'une force très vive, et des bruits saccadés rompirent encore le sommeil de notre meunier. Lentement mais lourdement les bruits se rapprochèrent jusque dans la chambre, tout près de son lit. La gorge serrée, n'osant respirer, le pauvre garçon apeuré avait trouvé refuge sous son lit, et blottit contre la muraille ne reprit son assurance qu'au moment où ces bruitages s’éloignèrent et se perdirent dans l’obscurité de la nuit. 

    Le même fait se reproduisit pendant trois, quatre, cinq fois jusqu'à ce que le brave meunier téméraire et empli de curiosité se résolut enfin de tirer cette affaire au clair.

    Afin de surprendre son énigmatique visiteur, il s'arma de courage et, une nuit, dès que les bruits se firent entendre, aussitôt il alluma les lampions et sauta du lit. Mais d’un souffle d’air la bougie de sa lanterne s’éteignit et plongea la chambre dans l'obscurité. Près de son lit un profond soupir se fit entendre, effrayant et glaçant le sang,… puis les bruits s'éloignèrent de nouveau.

    Le jeune homme devint aussi blanc que sa farine et transit d’effroi ne put fermer l'œil du restant de la nuit jusqu’au chant du coq. 

    Alors au lever du soleil, le meunier descendit au pied de son moulin, l'esprit hanté par ce fantôme, se méfiant jusqu’à son ombre et jusqu’au bruit de ses propres pas. 

    La nuit venue, il alluma une lanterne hermétique et close, et afin d’en découdre, dès qu'il entendit un bruissement, il se précipita dans l'embrasure de la porte.

    Et à sa grande surprise, un bel oiseau blanc frôla son visage et d'un vol rapide traversa la petite chambre. D’un bruit cadencé de battements d’ailes l’intrus disparut aussitôt dans le bleu de la nuit par la petite fenêtre entr’ouverte en direction des étoiles, abandonnant sur le lit du meunier une belle plume blanche.

    Le lendemain matin, le jeune meunier abasourdi par ces événements couru au Temple du village et s’enquit raconter les détails de son aventure au Pasteur qui lui recommanda, lorsqu'il entendrait du bruit, de questionner cette âme en peine qui troublait et hantait ainsi son sommeil.

    De fait le meunier tint compte de cette recommandation et la nuit suivante, dès qu'il ouï le moindre bruit, s'écria :

— « Mille Diou dé mille Diou, en bé o en mal, digas que vols !!! » (Mille Dieux de mille Dieux, en bien ou en mal, dis-moi ce que tu veux !!!)

Alors, dehors une petite brise se leva, les ailes du moulin se mirent tout doucement et lentement à tourner. Le meunier entendit alors une voix douce lui murmurer :

— « Je suis l’âme de ton moulin et je ne trouverais le repos que lorsque tu éclaireras toutes ces nuits sombres de la seule clarté de l’histoire de mon passé.»

    Le jeune meunier dubitatif médita et comprit alors que son moulin ne servait pas uniquement à faire de la farine pour nourrir les ventres, mais se devait aussi de servir l’Histoire pour nourrir les âmes. Alors songeur, il s’exécuta, se mit aussitôt au travail et puisa toute la nuit dans sa mémoire ainsi que dans ses vieux grimoires afin de nourrir l’âme de son moulin.

    Le lendemain, fier de sa mission de mémoire le meunier s’en alla interroger les habitants du village, le Maire, l’Instituteur, le Curé, le Pasteur, Marcel le boulanger, Pépé Jean de LA GLEIZETTE « La petite Eglise », Henri de LA BOURGUERE, Phine de CHARON, ainsi que les membres des plus anciennes familles du village, BAYLE, BERGE, CABANAC, CATHALA, COMMENGE, CROUZET, MASSAT, MILHORAT, PONS, RIBAUTE, ROLS, ROUGALE, SANS, SOULA, VERGE, etc…

    Durant de longues soirées, le jeune meunier rassembla et compila les souvenirs, les anecdotes et les légendes ainsi recueillis. Sur son manuscrit de feuilles blanches comme la farine, de sa belle plume blanche plongée dans l’encre bleu de la nuit, il coucha sur le papier la belle et grande Histoire du vieux moulin « DARRE LA GLEIZE ».

    L’âme du moulin enfin apaisée, jamais, au grand jamais, le sommeil du meunier ne fût perturbé. De longues années s’écoulèrent et le vieux meunier, éprouvé et épuisé, à son tour mourut.

    Le jour de ses funérailles, au pied des remparts dans le cimetière protestant, une petite brise se leva. Au loin les ailes du moulin se mirent lentement à tourner et dans le silence du recueillement, une majestueuse colombe s’invita et dessina dans ce grand et beau ciel bleu un grand cœur blanc. Puis comme pour remercier une dernière fois le vieux meunier, l'oiseau déposa une de ses plus belles plumes blanches sur la sépulture de granit noir immaculée de farine albe, et d’un battement d’aile disparu à tout jamais vers l’horizon des sommets enneigés des PYRENEES. 

    Depuis ce jour ainsi privé de son dernier meunier le vieux moulin fût désarmé et resta longtemps abandonné. Malgré les affres du temps, bien que délabré, décapité et amputé de ses ailes, le vieux moulin des âmes fier de son passé est resté debout dans l’espoir d’accueillir un jour un nouveau meunier.

    Alors, si un jour dans le ciel bleu du Moulin « DARRE LA GLEIZO » vous apercevez un bel oiseau blanc, ayez une petite pensée pour tous ces braves meuniers qui vécurent ici dont les âmes depuis le moyen-âge hantent et hanteront encore pour toujours ce lieux si magique et si authentique du petit village du CARLA-BAYLE.

                                                                                  

                                                « Selon une adaptation de Eric CABANAC MANTELLI en l’an 2022. »


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